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Discours de S.E. Amandin Rugira lors de la soirée de la mémoire dans le cadre de la 25ème commémoration du génocide contre les Tutsi en 1994 au Rwanda
Prononcé le 7 avril 2019 à l'Université Libre de Bruxelles
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Madame Félicité Lyamukuru, présidente d'Ibuka Mémoire et Justice
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Chers compatriotes,
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Chers rescapés du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda,
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Chers amis du Rwanda,
Permettez-moi de commencer en remerciant l’ASBL Ibuka Mémoire & Justice pour avoir initié ses soirées mémorielles en Belgique, et ce dès le 7 avril 1995. Comme l’expliquait Mr Hangu Gakumba lors du colloque tenu au Sénat de Belgique, Ibuka Belgique est la mère des autres branches d’Ibuka à travers le monde, y compris la section du Rwanda.
Vous avez été les pionniers de ce travail de mémoire et nous vous en seront toujours reconnaissants.
Ces veillées sont, à mon sens, la pierre angulaire du devoir de mémoire et de sa transmission aux futures générations. Elles me sont chères parce que seuls les témoignages permettent d’appréhender les événements tels qu’ils se sont déroulés et de comprendre comment les gens l’ont vaincu. Ce ne sont pas des analyses ou des études, ce sont des faits.
Mesdames et messieurs,
Alors que nous honorons la mémoire de ceux qui ont péri, la commémoration invite chacun à réfléchir à cette partie de l’histoire du Rwanda et à comprendre l’empreinte durable du génocide. Comprendre le processus qui a conduit au génocide et les événements du génocide est de la plus haute importance pour la prévention de futurs génocides.
25 ans est un temps à la fois long et court, qui pose la question de la transmission. Nous avons en face de nous une génération née après le génocide contre les Tutsi. De ce fait, certains ne connaissent pas la genèse de l’idéologie génocidaire. Ce génocide, comme vous le savez, n’a pas été perpétré du jour au lendemain. Il résulte de quarante années de politique discriminatoire légalisé, et il a eu pour prélude de pogroms qui ont visé la population Tutsi. L’apogée de toute cette entreprise meurtrière s’est soldé par 100 jours de massacres et plus d’un million de victimes.
Vous savez mieux que personne que derrières ses chiffres il y a des noms, des itinéraires, des souvenirs et des destins fauchés. Derrière ces chiffres il y avait des fils et filles du Rwanda d’âge et de conditions diverses, qui furent exterminés parce que nés Tutsi.
Celles et ceux qui ont survécus au génocide et qui, en 1994 étaient encore enfants ou adolescents, sont aujourd'hui parents. Il ne s’agit plus seulement de raconter au monde leur histoire, mais de la transmettre à leurs enfants en mettant des noms et des visages à une grand-mère, un oncle ou une cousine.
Chers compatriotes,
Nous devons plus que jamais être unis pour réconforter les survivants. Au début de cette période de deuil, sachons être sensible à leurs détresses, soyons attentif à leurs besoins et réactifs à leurs demandes.
Au-delà de ces 3 mois de deuil, nous devons veiller à rester de bon conseil lorsque nos compatriotes rescapés hésitent à écrire, ou à se porter en justice. Le courage qu’il leur faut pour entamer pareille démarche devrait être partagé par chacun d’entre nous puisqu’au final, nous seront, à travers nos enfants et petits-enfants, les premiers bénéficiaires des conséquences de leur transmission.
Plus que jamais, leurs voix tranchera face au velléités négationniste et aux discours révisionnistes qui pullulent de toutes part, en particulier en Belgique.
Comme je le disais ce matin à la stèle, sachez faire bon usage de votre poids électoral pour atteindre nos objectifs de lutte contre toute les formes d’impunité qui entache le génocide contre les Tutsi du Rwanda.
Cher rescapés,
Je voudrais ici saluer votre courage et votre ténacité :
Pour nous, vous surmontez les images qui vous hantent,
Pour nous, vous transcendez la peur de la contradiction,
Pour nous, vous démontrez ce qu'est la résilience.
Votre bravoure forge le respect et inspire, sans nul doute, les nouvelles générations de rwandaises et rwandais qui vous observent.
Je vous remercie pour votre attention.